Mycosis fongoïde et papulose lymphomatoïde : une association à ne pas méconnaître - 18/06/23
Résumé |
Introduction |
La papulose lymphomatoïde (PL) est une affection cutanée chronique, récidivante et autorégressive qui appartient au spectre des troubles lymphoprolifératifs CD30(+). La PL de type B est rare et se caractérise par un infiltrat épidermotrope simulant un mycosis fongoïde (MF) et qui peut ne pas exprimer le CD30. Nous rapportons une observation originale de PL CD30(−) type B qui est apparue simultanément avec un MF.
Une femme âgée de 68 ans nous consultait pour une éruption faite de papules ulcérées avec épisodes de surinfection évoluant par poussées depuis quelques mois. L’examen cutané a objectivé des plaques érythémateuses finement squameuses non infiltrées au niveau du tronc et des membres. Elle avait également des papules et des plaques érythémato-violines, ulcéro-crouteuses et nécrotiques par endroits qui siégeaient en dehors des plaques érythémato-squameuses sus-décrites. Le diagnostic de PL associée à un MF a été évoqué. On a pratiqué deux biopsies cutanées : la première intéressait une plaque érythémato-squameuse et la deuxième intéressait une papule. La première biopsie a montré un épiderme légèrement acanthosique, sans spongiose ni nécrose kératinocytaire. Un épidermotropisme marqué était présent dans la couche basale de l’épiderme. La deuxième biopsie a révélé un infiltrat de lymphocytes atypiques s’organisant en bande sous-épidermique. Ces lymphocytes étaient aussi présents dans des vésicules intra-épidermiques réalisant des micro-abcès de Pautrier. L’histologie et l’immunohistochimie (IHC) avaient conclu à un infiltrat lymphoïde cutané épidermotrope CD3+, CD4+, CD30− s’accordant avec un MF au niveau des deux biopsies. Malgré l’histologie et l’IHC typiques de MF au niveau des deux biopsies, le diagnostic de PL CD30(−) type B associée à un MF a été retenu. Notre patiente a été mise sous méthotrexate à la dose de 10mg/semaine pendant 3 mois avec cicatrisation complète des papules et des plaques ulcéro-croûteuses.
La PL est une entité rare qui se présente cliniquement sous forme d’une éruption récurrente de papules ou de nodules ulcérés siégeant essentiellement au niveau du tronc et des membres. Ces lésions peuvent être prurigineuses. Le diagnostic est difficile d’autant plus qu’une PL peut mimer histologiquement un lymphome. La PL a cinq sous-types histopathologiques classiquement reconnus : A, B, C, D, et E. La PL est typiquement une lymphoprolifération à cellules CD30(+). Cependant, des entités CD30(−) ont été rapportées et sont typiquement des cas de PL type B avec une expression variable de CD30, en plus de quelques cas de PL type D. Le type B présente une architecture histologique et exprime un immunophénotypage qui sont similaires à ceux observés dans le MF classique. Ceci explique l’histologie et l’immunohistochimie identiques des biopsies de deux lésions cliniquement différentes chez notre patiente. Les plaques érythémateuses finement squameuses non infiltrées correspondaient bien à un MF cliniquement et ceci a été confirmé par l’histologie et l’IHC. Les papules et nodules ulcéro-croûteux et nécrotiques sont fortement évocateurs de PL malgré une histologie compatible avec un MF et la négativité du CD30. Ce cas est original car il combine une clinique typique de PL avec une histologie discordante. Un typage correct de la PL ne se base pas uniquement sur l’IHC mais plutôt sur un faisceau d’arguments cliniques, évolutifs, histologiques et immunohistochimiques. L’association MF-PL ne semble pas être fortuite. En effet, dans 10 à 15 % des cas, la PL est précédée, suivie ou associée à un MF. L’hypothèse d’une origine commune de ces deux maladies a été suggérée. Elle serait due à des réarrangements clonaux communs des gènes du récepteur TCR des lymphocytes. Les lésions de la PL, contrairement au MF, guérissent généralement spontanément en 4 à 6 semaines. Les options thérapeutiques de la PL comprennent les dermocorticoïdes, la photothérapie, le méthotrexate et certains rétinoïdes topiques. Si les lésions sont discrètes et peu symptomatiques, l’abstention thérapeutique peut être recommandée. Notre patiente s’est nettement améliorée sous méthotrexate.
Conclusion |
La connaissance des entités de PL CD30(−) permet d’éviter les pièges diagnostiques. Une surveillance prolongée de ces malades est primordiale d’autant plus que la PL peut être associée ou suivie par un MF, un lymphome CD30(+) ou un lymphome de Hodgkin.
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Vol 44 - N° S1
P. A145 - juin 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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